La Sorcière de Midi d’Antonín Dvořák

Le poème symphonique est une pièce orchestrale, généralement en un seul mouvement, qui tire son unité psychologique et musicale d’une source littéraire, picturale ou de tout autre support susceptible de stimuler l’imagination. C’est un genre tout à fait idiomatique de l’art romantique du XIXe siècle, qui a été mis en valeur par nombre de compositeurs dont Richard Strauss, Franz Liszt, Claude Debussy, Serguei Rachmaninov, Bedřich Smetana et Dvořák.

Compositeur tchèque célèbre pour sa Symphonie du Nouveau monde, Antonin Dvořák (1841-1904) fut l’un des porte-étendards de l’unité tchèque à l’image de son prédécesseur Bedřich Smetana (1824-1884). Soucieux d’honorer sa terre natale, Dvořák composa tout au long de sa carrière des œuvres inspirées par des danses issues du folklore de Bohème et de Moravie, comme le trio Dumky ou les Danses slaves qui connurent un succès retentissant dans toute l’Europe.

Après un séjour de trois ans aux Etats-Unis, il compose en 1896 quatre poèmes symphoniques inspirés par des ballades de son compatriote, le poète Karol Jaromir Erben (1811-1870), où se ressent la joie de son retour en Moravie. Les trois premiers (l’Ondin, la Sorcière de Midi et le Rouet d’Or), entrepris dès janvier, sont rapidement achevés en avril et le quatrième, la Colombe Sauvage, à l’automne. Ces contes en vers peuplés de créatures fantastiques, de royaumes enchantés et de sortilèges, sont issus des légendes populaires transmises par la tradition orale.

Les quatre poèmes symphoniques de Dvořák frappent par l’étonnante vigueur de l’inspiration et par la maîtrise fabuleuse de l’orchestration acquise le long d’une carrière déjà riche de neuf symphonies, trois concertos, de plusieurs ouvertures et d’innombrables danses, scherzos, rhapsodies… Contrairement à ses symphonies où l’on retrouve l’empreinte de Brahms, ils sont marqués par l’influence de Richard Wagner : utilisation de leitmotiv (thèmes musicaux explicitement liés à un personnage du drame), emploi de transitions abruptes et inattendues et mise en valeur particulière des cuivres.

L’histoire

La scène s’ouvre sur une atmosphère bucolique et paisible, vite perturbée par les pleurs de l’enfant imités par quatre petites notes agaçantes lancées dans l’aigu du hautbois. La mère se fâche une première fois et menace l’enfant d’appeler Polednice, la terrifiante sorcière de midi, icône féminine du père Fouettard, que les mères invoquent pour faire cesser les pleurs des enfants trop turbulents. Le calme revient avec la reprise du début de la pièce.

Hélas, la colère l’emporte. Après une transition saisissante, ou l’atmosphère s’assombrit brusquement, surgit la terrible Polednice. L’usage des graves de la clarinette, du basson et de la clarinette basse permet de suggérer les menaces de la vieille femme hideuse ainsi que l’angoisse de la mère et de son enfant.

Le combat de la sorcière et de la mère épouvantée qui protège son enfant se traduit par une sorte de danse grotesque dans un bref mouvement de scherzo reprenant habilement le thème du début et celui de la sorcière. Aux douze coups de midi, sonnés par la cloche, la sorcière disparaît sans avoir pu emporter l’enfant que la mère retient de toutes ses forces.

Après le départ de la sorcière, Dvořák répand peu à peu dans l’orchestre une éblouissante lumière laissant à chacun le soin d’espérer que jamais plus une mère ne sera excédée par les cris de son enfant et que plus jamais les enfants ne feront de terribles colères…

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Les 4 Motets sur des thèmes grégoriens de Duruflé

4 Motets sur des thèmes grégoriens op.10 (1960) – Ubi Caritas

Organiste virtuose, très célèbre aux Etats-Unis où il fit de nombreuses tournées, Maurice Duruflé (1902-1986) est surtout connu pour son Requiem joué dans le monde entier. Après avoir chanté à la maîtrise de Rouen, il étudie l’orgue  auprès de Charles Tournemire, Eugène Gigout et Charles-Marie Widor ainsi que la composition dans la classe de Paul Dukas. Il devient suppléant de Louis Vierne à Notre Dame de Paris en 1927 et trois ans plus tard organiste titulaire de Saint Etienne du Mont.

A l’image d’Olivier Messiaen et Jehan Alain, ses œuvres et ses improvisations sont très marquées par l’héritage de Charles Tournemire qui remit l’orgue au service de la liturgie à travers le retour aux mélodies de type grégorien (plain-chant) que rehaussent des harmonies aux couleurs proches de celle de Debussy et de Fauré. Très exigeant envers lui-même à l’image de son professeur Paul Dukas, Duruflé n’écrit que treize œuvres considérées par la critique comme des chefs d’œuvres d’équilibre et d’expressivité. Son Requiem pour chœur soliste et orchestre, tout emprunt de la sérénité de celui de Gabriel Fauré, connaît un succès considérable non démenti encore aujourd’hui.

En 1960, alors que Karlheinz Stockhausen développe son concept de musique aléatoire, Duruflé écrit un recueil de quatre motets d’inspiration grégorienne dont Ubi Caritas. Dans la tradition liturgique, ce texte accompagne la célébration du lavement des pieds du Jeudi Saint. La mélodie grégorienne du plain-chant est confiée aux alti. Cette œuvre aux harmonies chatoyantes est empreinte d’une très grande sérénité où le compositeur laisse apparaître pleinement la Foi profonde qui l’anime.

Ubi caritas et amor, Deus ibi est.
Congregavit nos in unum Christi amor.
Exsultemus et in ipso jucundemur.
Timeamus et amemus Deum vivum.
Et ex corde diligamus nos sincero.
Ubi caritas et amor, Deus ibi est.
Amen.
Où sont amour et charité, Dieu est présent.
L’amour du Christ nous a rassemblés.
Exultons et réjouissons-nous.
Respectons et aimons le Dieu vivant.
Et aimons-nous d’un cœur sincère.
Où sont amour et charité, Dieu est présent.
Ainsi soit-il.

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The First Nowell de Ralph Vaughan Williams

The First Nowell (1958)

Composé l’année de sa mort, The First Nowell 1 est le fruit d’un amour inconditionnel de Vaughan Williams pour le temps de Noël et les Carols (chants de Noël). Cette fascination transparaît également au travers d’autres de ses compositions parmi lesquelles : Fantasia on Christmas Carols (1912), On Christmas Night (1926) et Hodie (A Christmas oratorio, 1954).

The First Nowell, mystère de la Nativité pour solistes, chœur et orchestre, est construit d’après le scénario de Simona Pakenham à partir de spectacles médiévaux narrant l’histoire de Noël, de l’Annonciation à l’Epiphanie.

Le texte fut remis à Vaughan Williams quatre semaines avant sa mort. Malgré le temps étonnamment court dont il disposa, le compositeur orchestra deux tiers de la musique et put choisir tous les Carols de l’œuvre. C’est Roy Douglas qui acheva la pièce pour la création au Drury Lane Theatre de Londres.

Il existe aujourd’hui deux versions de cette œuvre magnifique.

La version complète comprend vingt numéros, huit parties récitées, une soprano, un baryton solos et trois Bergers qui chantent et récitent à la fois. La version de concert, interprétée ce soir, pour soprano et baryton solos, chœur et orchestre se divise en 12 parties.

L’orchestration raffinée et le langage souvent modal de cette œuvre lui donne un caractère extrêmement paisible, poétique et mystérieux.

« La musique de Noël de Vaughan Williams est touchante par sa fraîcheur et sa chaleur. C’est une musique à jouer et à apprécier à la veille de Noël, chez soi, au coin du feu, entouré d’enfants, dans une sereine quiétude. »

Stephen Connock, président de la Ralph Vaughan Williams Society

 

1 Nowell vient du français Noël, il est aujourd’hui une forme littéraire et peu usitée de Christmas. On considère que le mot Noël, apparu en français vers 1112, est issu par évolution phonétique et modification vocalique du latin natalis (« relatif à la naissance »). [source : fr.wikipedia.org]

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Fantaisie sur « Greensleeves » de Ralph Vaughan Williams

Ralph Vaughan Williams, compositeur britannique, dont on fête cette année le 50e anniversaire de la mort, est un des compositeurs anglais les plus importants de la première moitié du XXe siècle, tant par la profusion de son œuvre que par la qualité de son interprétation.

Entre 1897 et 1906, il fait ses études à Londres où il rencontre Gustav Holst avec qui il devient ami, puis à Cambridge et enfin en Allemagne où il suit l’enseignement de Max Bruch. Il fait la connaissance de Claude Debussy lors d’un voyage en France et de Maurice Ravel avec qui il se liera d’amitié. Très sensible aux chants populaires, dès son plus jeune âge, il les recueille, les édite et saisit toutes les occasions possibles pour les interpréter.

Ralph Vaughan Williams, compose grand nombre d’œuvres : 9 symphonies, des concertos, des ballets, des œuvres chorales et des opéras. C’est de l’introduction du 3ème acte de l’un d’eux, Sir John in Love, basé sur une nouvelle de Shakespeare, qu’est extraite la Fantaisie sur « Greensleeves », arrangée en 1934 par Ralph Greaves pour cordes, harpes et 2 flûtes ad libitum.

Cette Fantaisie se divise en trois parties. Une première exposition de la célèbre mélodie anglaise « Greensleeves » dont l’origine demeure assez incertaine et qui daterait du XVIe siècle, précède la partie centrale où est présenté aux violoncelles et alti un thème de danse populaire. A celui-ci succède, après une transition de la flûte solo, le retour de l’exposition.

Universellement connu, Ralph Vaughan Williams décède le 26 août 1958 à Londres. Ses cendres reposent à l’abbaye de Westminster, près de celles de son aîné, Henry Purcell.

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